Joel-Peter Witkin représentations de la folie, de l'écart, du dérèglement |
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L'objectif annoncé étant d'épingler quelques images de représentations de la folie, de l'écart ou du déréglement, des noms semblent s'imposer
et celui de Joel-Peter Witkin en fait partie. Dans l'œuvre abondante de cet artiste américain, n'importe quelle image aurait sa légitimité -j'ai d'ailleurs hésité à choisir celle-ci plutôt qu'une autre-. Et pourtant Witkin, qui est professeur de photographie aux États Unis, est loin d'être fou. C'est bien l'univers qu'il a créé dans son œuvre qui a construit cette image glauque, inquiétante, morbide, terrifiante et étrangement envoûtante d'une folie artistique. |
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Sur le site de la galerie parisienne Baudouin-Lebon*, Joel-Peter Witkin déclare : «...je sais que le fondement de tout mon travail repose
sur le désespoir de l'âme. Mes bienfaiteurs photographiques sont morts. Je vis pour créer des images représentant la lutte pour la rédemption des âmes.» Et s'il évoque les
âmes, c'est bien des corps qu'il traite. Et ces corps qu'il met en situation dans ces photographies extrêmement élaborées sont des corps complètement étrangers à notre ordinaire.
En effet, Witkin n'hésite pas à avoir recours à des cadavres qu'il va exhumer des morgues, à des spécimens de foire présentant des anomalies, des malformations, ou bien encore à des
individus marqués par des ambiguïtés sexuelles souvent spectaculaires. Les mises en scène, les lumières, les constructions de l'espace et de l'image elle-même, les apports purement plastiques (interventions directes sur la matrice) produisent des objets photographiques de très grande qualité. Ces pratiques de l'utilisation et de la représentation du corps humain peuvent évidemment nous faire horreur, nous révolter, mais il faut avoir conscience que ces extravagances, ces écarts, sont habituels dans la peinture classique (il suffit de traverser un certain nombre de salles du musée du Louvre pour s'en convaincre), et que cet état de fait n'est jamais remis en question. Joel-Peter Witkin revendique d'ailleurs sa place au sein d'une filiation dans une histoire de l'art générale ; ses photographies font habituellement référence à des maîtres ou à des toiles d'un grand classicisme (Rubens, Botticelli, Velazquez, Courbet , etc.). Alors, avec Witkin aurait-on affaire à des représentations d'une folie soigneusement pensée, raisonnée ? Ou bien à la démarche d'un individu-artiste raisonnable qui produit une œuvre infréquentable pour la raison ? |
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photographie : "Man without a Head", 1993 ©Joel-Peter Witkin extrait de Witkin, texte de Germano Celant, Éditrions Scalo,1995, illustration 102 *Galerie Baudouin-Lebon |
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Commentaires |
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mercredi 18 juillet 2007
mardi 17 juillet 2007
David NEBREDA
David Nebreda représentations de la folie, de l'écart, du dérèglement |
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Chez vous il n'y a pas de trucage !
Non, et c'est un point fondamental. Tout ce que l'on voit est ce que l'on voit. Mon activité est très simple. Je n'ai pas besoin d'interprétation. Le sang est mon sang, les excréments sont mes excréments, les photographies sont des photographies directes non manipulées, même la peur ou l'isolement sont une peur et un isolement sans nuances. La convention de pathologie mentale est une convention réelle, si on l'accepte, elle n'a pas besoin non plus d'interprétation * |
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David Nebreda est cet artiste espagnol qui produit une œuvre à la fois d'écriture et de photographie. Et ses photographies, s'il vous est arrivé d'en voir, vous ne pouvez pas les oublier. L'individu met en scène son corps. Il parle de lui à la troisième personne du singulier. Et pour ce qui est de la singularité, c'est quelqu'un d'extra-ordinaire. Cet artiste n'est pas dans la représentation mais bien dans la présentation : un corps cadavérique, couvert de stigmates, de plaies, de sang, un corps souffrant fait d'auto lacérations, d'auto mutilations qui s'étale généreusement dans toute sa gloire et dans tout son pouvoir ; un pouvoir capable de générer autant l'excécration que la fascination.
Au premier abord, les photographies de David Nebreda renvoient tous les signes d'une folie extrême ; s'il était encore besoin de nous convaincre du contraire, rappelons que Nebreda a séjourné dans des hôpitaux psychiatriques à différentes reprises. Mais à la lecture des textes qu'il écrit et qui accompagnent ces photographies, nous sommes frappés par la rigueur, la finesse de la pensée et par la culture de l'artiste ; ce qui nous entraîne à considérer ses photographies assez différemment.
Il y a quelques mois, j'avais déjà eu l'occasion de consacrer un billet à un portrait de David Nebreda en m'interrogeant sur les limites de l'autoportrait ; il s'agissait d'un autoportrait-tabou, dans lequel le visage avait disparu, un autoportrait sans tête réellement apparente comme si ces manifestations photographiques de la folie devaient se doubler d'une sorte de décollation, au moins symbolique. Je m'aperçois que dans cet autoportait d'aujourd'hui, la tête a encore disparu...
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photographie :Série autoretratos, "Après huit séances d'incisions sur la poitrine et les épaules, il atteint à une certaine tranquillité, l'hommage et le tribut étant alors accomplis" 29 juillet 1989 ©David Nebreda extrait de David Nebreda et le double photographique, article Art Press N° 255 de mars 2000, p 53 * texte : entretien David Nebreda avec Catherine Millet, même article p 54 |
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lundi 16 juillet 2007
Diane ARBUS .2
dimanche 15 juillet 2007
Diane ARBUS
Diane Arbus représentations de la folie, de l'écart, du dérèglement |
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Si l'on décide d'épingler arbitrairement quelques images de représentations de la folie, de l'écart ou du dérèglement, la figure de Diane Arbus est incontournable. Mais précisément pas dans cette photographie. La femme sans tête de Diane Arbus est tout simplement là pour faire écho à cet homme sans tête photographié par Raymond Depardon dans l'hôpital psychiatrique de San Clemente, au large de Venise au début des années 80... Ici tout est codé : le lieu, les circonstances, la personne photographiée, le dispositif, la prise de vue, etc. S'il y a écart, dérèglement ou folie, c'est bien dans la mise en scène du regard et de ce que cela produit. |
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photographie : Headless woman (femme sans tête), N.Y.C, 1961, ©Diane Arbus extrait de Diane Arbus Revelations, Éditions Schirmer Mosel, Munich, 2003, p 254. |
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samedi 14 juillet 2007
Raymond Depardon
Raymond Depardon représentations de la folie, de l'écart, du dérèglement |
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L'envie d'épingler quelques images des représentations de la folie, de l'écart ou du dérèglement et cette photographie de Raymond Depardon s'impose. Elle condense à elle seule tout ce qui est de l'ordre de l'inatteignable, du sans-nom, du sans-fond : un chaos définitif. Et ceci pour l'unique raison que nous sommes bien en présence d'un homme. |
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Cette image, je continue à la trouver bouleversante. Raymond Depardon se rend à San Clemente au début des années 80. San Clemente, c'est «l'île aux fous», au large de Venise. Il s'agit d'un hôpital psychiatrique qui s'étend sur toute l'île et qui va être détruit. Raymond Depardon s'y rend une première fois, ramène des photographies étonnantes puis l'idée qu'il doit y retourner avec une caméra s'impose. Ce qu'il va faire, en compagnie de Sophie Ristelhueber. Il en fera un film documentaire d'une force et d'une beauté inhabituelles qui constituera une sorte d'avancée et de référence. |
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photographie : San Clemente, Venezia, 1984, ©Raymond Depardon quelques références : * San Clemente par Depardon * parcours de Raymond Depardon |
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Commentaires
bravo pour ce site, il fait partie des 3 pourcent de la categorie photo des blogs... je peux le mettre en lien?
Commentaire n°1 posté par gallerie-schmit-vennet le 26/07/2007 à 16h17
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Dans un des commentaires que j’avais faits sur ton blog, j’avais repris une phrase de Jean Clair (extraite de son livre «Le nez de Giacometti») , j'avais écrit : «Quant à la mort, évoquée dans le billet, Jean Clair rappelle que le rapport qu'elle entretient au visage est déterminant, précisément par le biais du masque : il est difficile de tuer un homme en le regardant dans les yeux. Si les guerriers portent des masques, c'est moins pour se protéger des traits de leur adversaire que pour ne pas avoir à envisager les traits du visage qui leur fait face...»
Ce rapport au regard est déterminant.
Pop : Witkin parvient à créer chez beaucoup d’entre nous qui regardons ses photographies un sentiment étrange qui mêle comme je l’ai dit fascination et exécration. On peut avoir l’impresssion d’être dans le kitsch, le mauvais goût, le racoleur, mais on sent bien que d’une part les objets qu’il fabrique relèvent d’un réel savoir-faire, ont une dimension artistique indéniable (il fait preuve d’une véritable démarche) et qu’enfin, il touche à des préoccupations communes à tous, (sans même parler de sa connaissance et son inscription dans le flux de l’histoire de l’art qui lui confèrent une autorité intellectuelle). Ce qui provoque ce rapport aux œuvres (à ses œuvres) terriblement ambigu.
La référence à Géricault est bienvenue : penser à la genèse du Radeau de la Méduse et de la pourriture des modèles au milieu de laquelle vivait le peintre. Ce Géricault-là, c'est un certain héritage du baroque, comme Joel-Peter Witkin, peut-être.
Mais on pourrait également évoquer Baudelaire et son merveilleux poème sur la Charogne.