Seydou Keïta et le Prince
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"Le Prince impérial sur son poney, posant pour le photographe", vers 1859. MAYER & PIERSON |
"Portrait, Mali", années 50, Seydou KEITA |
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Approximativement un siècle et quelques milliers de kilomètres séparent ces deux photographies. Dans les deux cas, un photographe met en place une construction qu'il juge nécessaire à sa prise de vue. Étrangement, le dispositif retenu présente des similitudes. |
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photographie de MAYER & PIERSON, lieu de conservation : Hôtel Napoléon |
photographie de Seydou KEITA : mes archives ; sans doute le Photo-poche N°63, Robert Delpire/ACTES SUD, mais je n'ai pas noté d'où vient précisément le document (si quelqu'un a les références, me contacter).
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En tout cas, merci, c'est très agréable de voir cette petite série de photos de studio. Et puis, ça m'a fait plaisir de voir une photo de Samuel Fosso ; avec lui, le studio devient pièce de théâtre (un peu comme la photo du prince Impérial, finalement, mais avec l'auto-dérision en plus !). C'est un de mes photographes préférés ;-)
Tu as raison pour Sanders et Evans, mais je ne sais pas sil sagit dune réhabilitation (pour ce qui concerne Sanders, il y avait en tout cas une volonté encyclopédique, un souci de classification donc une volonté d'installation et de conservation ; javais dailleurs vu une magnifique expo il y a deux ans à Rome où cétait évident) mais je crois que ce « genre » a dune certaine manière toujours existé et a toutes les chances de continuer à exister : voir (toujours) les artistes allemands, et plus proches de nous, en France, Despatin & Gobeli, par exemple). Personnellement jaime beaucoup « la pose » photographique.
Pour Malick Sidibé et la question que je posais sur lorigine des codes, jai lu, évidemment lhistoire de son apprentissage et lexistence du fameux « Gégé » qui devait naturellement être lhéritier dune culture occidentale véhiculant ses propres codes. Si l'on cherche à identifier l'origine de ces codes, cest vrai, quà ce rythme-là, on peut remonter jusquà licône byzantine et à la disparition progressive de lisolant au tout début du Quattrocento ! ;-) Lavis de Guy Hersant mintéresse au plus haut point..
Jai bien aimé les portraits (autoportraits) de Samuel Fosso à Africa Remix, cette année à Pompidou.
Olivier Lugon : Le «style documentaire» d’August Sander à Walker Evans 1920-1945
Notes de lecture sur le bouquin d'Olivier Lugon et concernant August Sander (et non Sanders comme je l'ai écrit dans mon 1er comm ; après une petite dizaine de jours à regarder de la peinture de la Renaissance, j'ai pas les yeux en face des trous. Ca s'appelle "le syndrome de Stendhal", il paraît...) :
http://www.galerie-photo.com/le-style-documentaire.html
Pour la réhabilitation dont je parlais, je pensais surtout à Evans. Il a acheté une chambre en 1930, après l'invention du Leica et du Rollei, dont il ne pouvait ignorer ni l'existence, ni l'usage. Il était allé en Europe, avait vécu à Paris, en 1926-27. Il devait connaître ce qui se faisait à l’époque, et savoir que les avant-gardes parisiennes n'étaient pas toujours admiratives des photos réalisées à la chambre et dans le style documentaire. Bon, c'est vrai, ils aimaient beaucoup Atget, mais souvent pour des « mauvaises » raisons (parce qu’il avait photographié des mannequins, par exemple). Un des rares, je pense, à avoir compris l’importance des photos d’Atget, c’est Boiffard. Il était assistant de Man Ray, en même temps que B. Abbott, quand Man Ray a découvert l’œuvre d’Atget. Dans ses photos pour Nadja (dans une moindre mesure, dans le film Paris-Express) on sent l’influence d’Atget. Or on sait que Breton détestait les photos réalisées par Boiffard pour Nadja. Bref, ce que je voulais dire, c’est qu’Evans a volontairement choisi d’acheter une chambre et de faire poser les gens à une époque où la modernité consistait surtout à faire des instantanées et à faire basculer les angles. Mais tu as raison, ce n’est sans doute pas vrai chez Sander… Et tu as raison bis : ce genre a toujours existé et continuera toujours à exister.
Pour ta phrase : « on peut remonter jusqu’à l’icône byzantine et à la disparition progressive de l’isolant au tout début du Quattrocento » : tu pourras m’expliquer ;-) ??
Il y avait au même moment que l’expo Africa Remix des photos de Samuel Fosso à l’expo Africa Urbis organisé à la galerie « Musée des arts derniers ».
J’aime beaucoup toute ta série de photos…
Je nai pas vu les Samuel Fosso au Musée des arts derniers
Javais écrit : Si l'on cherche à identifier l'origine de ces codes, cest vrai, quà ce rythme-là, on peut remonter jusquà licône byzantine et à la disparition progressive de lisolant au tout début du Quattrocento !
Bon, je ne vais pas rentrer dans le détail mais si lon se met en quête dune sorte de traçabilité visant à repérer dans une série dimages létape précédente dont certains éléments auraient été à lorigine dun trait de fabrication, dun code adopté par la suite, il faut décider doù lon démarre. Dans la confrontation de ces deux images on se doute que Seydou Keita a subi (malgré lui ?) linfluence des codes de pose, ainsi que de linstallation des décors, qui date (au moins) de lépoque de Mayer & Pierson (via les photographes blancs qui se sont installés en Afrique et qui ont fonctionné comme modèles). Mais le modèle figé de Mayer & Pierson de 1859 devait être vraisemblablement lui-même lhéritier de la représentation dHippolyte Bayard en noyé qui, lui, ne pouvait absolument pas bouger durant un temps excessivement long sil voulait une photo nette (le temps de pose était lorsquil la fait de trente minutes à deux heures!), doù le modèle qui fait le mort adossé à une toile de fond. Les contraintes liées aux conditions techniques de cette prise de vue vont sans doute conditionner lesthétique et produire du code.
Doit-on arrêter cette recherche de lorigine des codes aux débuts de la photographie ? Evidemment non puisquelle-même est héritière de la peinture et quon voit très nettement les codes de la peinture utilisés, notamment, aux débuts de lhistoire de la photographie.
Et la peinture est elle-même, au cours de son histoire, une suite de codifications et de transgressions progressives ou radicales. Jévoquais (pour faire un clin doeil) lhistoire de lisolant : les figures (ex : la Vierge) représentées sur les icônes byzantines sont sur un fond plat, sans profondeur (pour parler vite, pas de paysage, pas de décor). Les premières vierges peintes en Italie conservent ce fond (lisolant qui permet de préserver symboliquement la virginité de Marie et de la présenter au reste du monde). Cet isolant (sorte de toile de fond ) va progressivement et timidement glisser : voir certains Giovanni Bellini, par exemple, laissant apparaître quelques petits élément de paysage pour finalement disparaître :
Doit-on faire remonter la mise en scène de Seydou Keita à celle de la Madonna degli Alberetti de Giovanni Bellini ? Ce serait, sans doute, ridicule. ;-)
Merci pour ton commentaire sur les petites photos. Je dois trouver le temps d'en mettre d'autres.