Quand on traite des ombres portées, on ne peut passer sous silence, le thème autrefois en vogue de l’«invention de la peinture», qui situe l’origine de l’art du portrait dans le dessin d’une ombre. D’où la présence du tableau de David Allan (ci-contre). Chez l’encyclopédiste romain Pline l’Ancien, cette fable poétique prend la forme d’une histoire d’amour. La fille du potier Butadès de Sicyone était amoureuse d’un jeune homme. Celui-ci partant pour l’étranger, elle entoura d’une ligne l’ombre de son visage projetée sur le mur par la lumière d’une lanterne; son père appliqua de l’argile sur l’esquisse, en fit un relief qu’il mit à durcir au feu. Pline rattache cette légende à l’art du modelage, et non à l’histoire de la peinture. Peut-être parce que le portrait de profil était lié dans l’Antiquité aux pièces de monnaie et aux premières effigies funéraires.
L’anecdote semble plausible, et pourtant, si on veut faire l’expérience, on s’aperçoit que ce n’est pas si commode. Notre ombre s’interpose et cache le contour que l’on voulait suivre. On a beau s’écarter autant que possible, l’ombre de la main tombe forcément sur l’endroit précis où l’on essaie de dessiner.
E.H GOMBRICH
Ombres portées, collection Art et artistes, Éditions Gallimard, 1996, p 43/45
Je suis tombée sur ce site à la recherche de données sur Butadès de Sicyone. Cependant cet extrait m'a frappée !
Je respecte beaucoup le travail de Mr Gombrich, mais je ne suis pas d'accord avec lui sur le point qu'il définit ici. On peut tout à fait dessiner le contour d'une ombre sans que celle de notre main se mette devant...
Quelqu'un sait-il sur quoi il s'est appuyé pour argumenter ceci ?
Tout mes encouragements pour ce magnifique site.
ce que j'ai retranscrit ici est le texte d'E.Gombrich. Il a du témoigner de sa propre expérience, me semble-t-il. C'est vrai qu'on finit par y arriver mais par définition, une partie de l'ombre projetée doit disparaître si l'on approche sa main du support car on créé soi-même une ombre.