lundi 18 septembre 2006

David NEBREDA

  David Nebreda
Delectatio  : l'art s'est longtemps donné pour fin de réjouir les sens. Pourtant, il  semble que ce soit d'un tout autre registre que joue l'oeuvre contemporaine.  Comme l'indique le titre d'une exposition récente, "L'art  de la répulsion", le temps du dégoût a remplacé l'ère du  goût. Exhibition du corps, désacralisation, vilification de ses fonctions et  de ses apparences, mutilations et automutilations, fascination pour le sang et  les humeurs corporelles, et même pour le stercus  : de Beuys à Louise Bourgeois, de Jeff Koons à Orlan, l'art  actuel est engagé dans une cérémonie où le sordide et l'abjection écrivent  un chapitre inattendu de l'histoire du goût.
         
  Ce propos introduisait une invervention de Jean Clair dans le cadre des XVIIIème  Journée de Psychiatrie du Val de Loire à l'Abbaye de Fontevraud, le 21 juin 2003 autour du théme, "La beauté : remède, maladie ou vérité". L'intervention  s'intitulait : Une esthétique du stercoraire.
Navid Nebreda est espagnol. Cette photographie est extraite d’une série intitulée Autoportraits, donc cette photographie est un autoportrait. C'est un portrait qui représente un visage, le sien.
Dans son intervention de Fontevraud, Jean Clair disait : au premier coup d'oeil (...) on hésite à comprendre. Peut-être a-t-on déjà saisi mais on se refuse à accepter ce que l’oeil vient de voir. C’est un visage.(…) C’est un masque d’infamie qui suscite en nous l’horreur. Le principe capital du  corps est devenu anus mundi. Et le visage est devenu cloaque.
(...)
David Nebreda a été hospitalisé à maintes reprises souvent pour de longues périodes, avec un  diagnostic, bien incertain sans doute, de schizophrénie paranoïde.
 Avec cet artiste nous avons affaire à une contradiction au premier degré. David Nebreda s'exprime très soigneusement. A la lecture des livres qu'il publie, nous nous rendons compte qu'il est cultivé et que l'individu raisonne avec intelligence et rigueur. Son propos est subtil, complexe et il est tout à fait conscient de sa démarche dont il éclaire le cheminement soigneusement. Ses photographies, très soignées, précises, d'une grande beauté formelle, sont l'expression parfaite de cette posture extra-ordinaire (au sens littéral : nous sommes face à une situation qui n'a strictement rien à voir avec l'ordinaire que nous partageons).

D'autres artistes, comme Antonin Artaud par exemple, ont montré que ces chemins-là existaient. Les humeurs du corps sont prises en compte par les artistes tourmentés (Artaud, Pontormo, etc.) mais pas seulement. Rappelons, comme le fait Jean Clair dans sa contribution, qu'il y a une histoire de la merde en art (et rajoutons une histoire des humeurs en général) et qu'elle n'est pas réservée qu'aux artistes déséquilibrés. Jean Clair mentionne certains propos d'artistes comme ceux de Picasso qui, à la question : "Maître, que  feriez-vous si vous étiez en prison, sans rien ? ", aurait répondu :  "Je peindrais avec ma merde".  Ou bien encore Rembrandt qui aurait dit : "Reculez-vous, l'odeur de la peinture n'est pas  saine". Il faudrait citer, plus près de nous, Piero Manzoni conditionnant ses excréments dans de petites boîtes de conserve sur lesquelles sont inscrits les mots  : Merda d'artista. Ou encore, Gérard Gasiorowski fabriquant ses "tourtes", sculptures fécales  ou peignant avec  ses "Jus", liquides bruns et odorants, tous à base d'urines et d'excréments personnels. Ou, plus proche de nous encore, Wim Delvoye, artiste belge ayant inventé cette machine étonnante nommée Cloaqua.

L'histoire des sécrétions du corps et de leur utilisation à des fins artistiques a eu un certain nombre d'adeptes, de Beuys à Louise Bourgeois, en passant par Andy Warhol et plus récemment Chris Ofili,  sans oublier Marcel Duchamp, naturellement...
Cézanne déclarait en son temps : "La  peinture, c'est comme la merde, ça  se  sent, ça ne s'explique pas"...
         
Mais, dans le cas de cet artiste, David Nebreda, c'est la conjonction de l'excrément et du visage qui relève de quelque chose s'apparentant sans doute au tabou.


photographie : David  Nebreda, Autoportraits, Paris, Editions Léon Scheer, 2000
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Commentaires


Eh ben m... alors!
Commentaire n°1 posté par Béat le 20/09/2006 à 01h43
tu l'as, le livre d'autoportraits de Nebreda ? (ou bien : tu l'as vu ?)
Commentaire n°2 posté par laurence le 22/09/2006 à 19h22
On me l'a volé... J'en ai un autre (peut-être plus rare?) avec un beau titre sur sa couverture : "Chapitre sur les petites amputations" (toujours aux Éditions Léo Scheer). Grande beauté formelle également. Texte extrêmement ciselé comme les lacérations qu'il pratique sur sa peau. Ames sensibles, s'abstenir...
Commentaire n°3 posté par holbein le 22/09/2006 à 19h48
Bel article de plagiat dont l'auteur aurait du avoir  l'honnêteté  de faire un lien vers ses sources : http://www.med.univ-angers.fr/services/AARP/2003/clair.htm
Commentaire n°4 posté par D Rousseau web-master des journées de Fontevraud le 29/11/2009 à 15h49
Relire le début de l'article :

Ce propos introduisait une invervention de Jean Clair dans le cadre desXVIIIème  Journée de Psychiatrie du Val de Loire à l'Abbaye de Fontevraud, le 21 juin 2003 autour du théme, "La beauté : remède, maladie ou vérité". L'intervention  s'intitulait : Une esthétique du stercoraire.

Ceci n’était qu’un simple compte rendu. Désolé, cher web-master, d’avoir  –sans aucune intention malveillante- taquiné votre sensibilité…
Pas de paranoïa : je m’en vais de ce pas rajouter ce lien.
Et ne remuons pas le stercoraire (ça sent mauvais ;-)
Commentaire n°5 posté par espace-holbein le 29/11/2009 à 17h49

Une critique dans un point de vue différent de l'oeuvre de Manzoni :

http://www.zoohumain.fr/rubrique,30-gr-de-merde-et-30-000-euros,1215260.html

Surprenant !
Commentaire n°6 posté par lascalae le 26/04/2010 à 20h50

         

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