Sturtevant galerie Thaddeus Ropac 3 mars-7 avril |
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Sturtevant galerie Thaddeus Ropac Une majesté, un mystère, une très belle ambiance |
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illustrations : -©Sturtevant, installation, photographie empruntée au site de la galerie Thaddeus Ropac -photographie de l'auteur Commentaires |
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jeudi 29 mars 2007
mardi 27 mars 2007
Les KRIMS
Wishful Thinking, Satire Inspired by the Decline of the Left in America galerie Baudouin Lebon 15 février-21 avril 2007 |
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Les Krims est un photographe américain. En 1974, pour la première fois, Robert Delpire montre son travail en France. La renommée du photographe est internationale et beaucoup de ses tirages font partie des grandes collections aussi bien privées que publiques. Et pourtant son œuvre, depuis toujours, suscite la controverse. |
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Pour le situer, il faut d'abord dire qu'il est un des grands représentants de ceux qui mettent en scène la photographie. Il appartient à cette famille de photographes qui préparent longtemps et soigneusement l'espace et les conditions de la prise de vue (à l'opposé de la «street photography», par exemple).
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L'image choisie en amorce du billet sur cet artiste n'est sans doute pas représentative du style de Les Krims mais elle incarne bien le souci de la mise en scène dont il est coutumier.
Qu'est-ce qui peut bien caractériser cette démarche artistique qui fait qu'un tirage de Krims est immédiatement identifiable ? Déjà, Les Krims crée l'artifice. Sa photographie est fabriquée, et ceci de manière très ostentatoire. L'impression immédiate d'une certaine superficialité préside. Le sentiment inverse, de profondeur, de sérieux, d'une grande détermination s'impose ensuite. Et puis, l'extrême profusion est souvent au rendez-vous : la surcharge, l'extravagance, la suproduction et l'envahissement visuel sont des données fréquemment présentes. On pourrait qualifier de baroque ce travail hyperorganisé, fondé sur l'accumulation et l'agencement délirant où l'œil finit par se perdre. Le travail de préparation du décor est impressionnant. |
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Au sein de cet espace constitué d'objets proliférants, aux couleurs vives, organisés de manière rigoureuse, des figures, généralement nues, sont installées, à la manière d'objets et prennent la pose.
Cette effervescence visuelle, liée à la nudité des modèles ainsi qu'à la trivialité des objets montrés, produit un certain malaise. On ressent, une volonté, de la part de l'artiste, d'emboîter le pas à une certaine tradition de la transgression et ceci dans plusieurs directions : la nudité (montrée de manière dérangeante), la religion (des symboles sont utilisés à répétition comme la croix, l'étoile de David, la figure de la Sainte, etc.), le mauvais goût affiché, la figure de la mère de l'artiste utilisée de manière non-conventionnelle (photographiée nue par son propre fils et "décorée" de photographies collées sur son corps, ou manipulant son dentier). |
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Ce fourmillement qui intègre le grotesque, le gênant, la désacralisation, le superficiel, va interroger celui ou celle qui est amené à rencontrer ces images. Les objets sont intensément en rapport avec le monde du quotidien des Américains. Ce rêve américain dont se sont nourris tant d'individus. Il serait aisé, et rassurant, de dire que Les Krims en fait une critique et montre ici l'envers de ce rêve. Je n'en pas si sûr. Les Krims est forcément conscient des limites et des dérives de ce mode de vie mais force est de constater qu'il demeure, chez ces artistes américains, une part de fascination, y compris pour les éléments et les pratiques les plus détestables de ce Way of Life (à l'instar de ce qui se passait déjà dans la tête des artistes du Pop art comme Andy Warhol, par exemple).
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Plusieurs facettes de ce travail sont passionnantes : on voit l'intérêt pour l'histoire de l'art et le questionnement que cela engendre ; on voit également à la fois les influences, les correspondances, les goûts, voire les amitiés pour d'autres artistes ; en vrac : Diane Arbus, Martin Parr, Sandy Skoglund, Duane Michals, Lucas Samaras et même Claude Monet... Il faut attirer l'attention sur l'importance des titres (souvent extrêmement longs, et qui excèdent, parfois, la fonction d'un titre) et l'inclusion de ces titres dans le champ de l'œuvre. |
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Nous connaissions les tirages argentiques, soigneusement encadrés, de Les Krims. Aujourd'hui la galerie Baudouin Lebon présente de grandes impressions couleur accrochées par des pinces à dessin selon un mode d'accrochage accumulatif allant dans le sens et l'état d'esprit des photographies de l'artiste. Ceci confère beaucoup d'intérêt à l'exposition.
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illustrations : -site de la galerie Baudouin Lebon -site de Les Krims -site Wantedparis.com -photographies de l'auteur (galerie Baudouin Lebon) |
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- site de la galerie Baudouin Lebon. - site de Les Krims Commentaires
je pensais avoir raté cette expo qui, selon une autre source, se serait achevée le 17 mars. Les erreurs peuvent être douces! J'ai repéré, depuis quelques jours, sur le site puis dans la galerie Wanted, une photo de Les Krims intitulée "Feeding Jesus Stawberry Ice Cream with a small Spoon Mary Miracle" qui me plaît beaucoup: il y a une moto, un dragon et ... une Madone et des anges. L'agencement est parfait et le climat irrévérencieux , grotesque, sûrement sarcastique mais aussi magique et joyeux..comme une ice cream on fire !
Merci pour l'agenda exact de la galerie Baudoin Lebon!
Commentaire n°1 posté par Ch le 04/04/2007 à 22h20
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samedi 24 mars 2007
Sigmar POLKE .3
Sigmar Polke Musée Frieder Burda, Baden-Baden rétrospective, jusqu'au 13 mai 2007 |
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Sigmar Polke va prendre plaisir à entretenir la confusion entre la peinture traditionnelle, faite à la main, et l'utilisation de moyens mécaniques ou plutôt l'apparence des représentations mécanisées des images. Un certain nombre de ses toiles montrent des scènes ou des objets apparemment traités à l'aide du procédé de similigravure aisément repérable du fait de sa trame visible dont la taille des différents points traduit les dégradés de l'image. Cette technique a été utilisée par la presse à grand tirage. Les effets de ce procédé photomécanique confèrent une réelle valeur plastique aux images à l'occasion d'un grossissement. Polke va mettre en scène ce type de procédé mais en mettant en défaut l'intérêt même de cette technique de reproduction rapide puisqu'il réalisera ses trames à la main (photo ci-contre). | |||||||||||||
Il appliquera cette démarche en utilisant également les effets de la quadrichromie, et particulièrement d'une
mauvaise quadrichromie, celle qui laisse apparaître le détail de la séparation des couleurs. Il accusera l'entreprise en choisissant pour modèles des photos non valorisantes
(comme ces jeunes filles, ci-dessus) empruntées à des magazines légers afin de renforcer l'idée d'une image sans qualités.
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Ce jeu sur les procédés de reproduction mécanique des images va faire l'objet de mises en scènes pleines d'humour à l'instar de
cette œuvre qui montre un pochoir, outil de reproduction rapide et répétée, mais à côté duquel Polke a rajouté des objets courants qui ont la forme de pochoirs mais qui n'en sont pas
(ici,sous-plats en papier ajouré pour gâteaux d'anniversaire)...
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Et l'on va retrouver cette volonté de brouiller les pistes dans un certain nombre d'œuvres de Sigmar Polke qui va faire référence, de manière humoristique, à des procédés techniques ou
mécaniques complexes ou stéréotypés, selon les cas. Les mélangeant, le plus souvent possible...Et les uns faisant écho aux autres. La structure filaire permettant de configurer les
volumes dans les représentations d'images de synthèse (en haut, à gauche) va se trouver confrontée à un simple jeu pratiqué par les enfants et qui consiste à souffler sur une tache de
peinture liquide et à orienter simultanément le support pour diriger son geste ou bien, tout simplement, à diriger des coulures de peinture sur un plan que l'on va incliner en différents
sens en tentant une représentation ou le dessin d'une forme géométrique (en haut, à
droite). Les deux résultats renvoient formellement à une technique apparemment élaborée, ou
en tout cas, qui semble donner toutes les apparences d'un procédé technique ou mécanique qui n'est pas du simple dessin direct.
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Sigmar Polke va sans cesse interroger les images, nous rappeler sans arrêt que l'on bien affaire à des
images. Aucune ambiguïté. Aucune prétention. La mécanique et les techniques les plus sophistiquées n'y pourront rien. On passe toujours avec lui d'un monde à un autre ; les cloisons (même de verre) sont poreuses et nous les franchissons avec bonheur. |
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Illustrations : - Sigmar Polke en train de peindre, 1970, ©Sigmar Polke, extrait du catalogue Polke, eine Retrospektive,2007, p 138 - Freundinnen, 1965/66, photographie de l'auteur - Freundinnen, (détail)1965/66, photographie de l'auteur - Schnell, schnell, Isabell, 1979, ©Sigmar Polke, extrait du catalogue Polke, eine Retrospektive,2007, p 202 - Eruption 1992, ©Sigmar Polke, extrait du catalogue Polke, eine Retrospektive,2007, p 209 - Jenseittskontakte, 1995, gouache, ©Sigmar Polke, extrait du catalogue Polke, eine Retrospektive,2007, p 212 -Mann steigt durch Glaswand, 1992, ©Sigmar Polke, extrait du catalogue Polke, eine Retrospektive,2007, p 208 Exposition Sigmar Polke, museum Frieder Burda Commentaires
Très sympa.
Pour de nouvelles aventures : Please visit http://teka.over-blog.org/ Cordialement.
tres sympa?? ca ne se dit pas! tout mais pas sympa, c'est comme dire que c mignon: c'est ridicule. Interressant a la limite mais on ne dit pas "tres sympa". Polke c'est plus profond qu'une simple chose "sympa"tique, pour dire ca autant ne rien dire.
Commentaire n°2 posté par LEPEZ le 25/01/2008 à 10h34
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vendredi 23 mars 2007
Jenny HOLZER
Nothing Follows
«Protect Us from what we don't know» galerie Yvon Lambert, 10 mars - 14 avril |
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Jenny Holzer used declassified documents «The works shown by Jenny Holzer explore the murky zone of redaction (editing) in the post 9/11 era when assurances of national security and guarantees of personal liberty often seem to be mutually exclusive. They were contributed by anonymous officials who, erased with black markers, excised information from top secret records so they could be released to the public.» «Protect Us from what we don't know» Cathy Lebowitz "Art in America", oct 2006 |
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galerie Yvon Lambert | ||||
mardi 20 mars 2007
David LYNCH - The Air Is on Fire .5
David Lynch The Air Is on Fire du 3 mars au 27 mai 2007 |
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«The Air Is on Fire» ("L'Air est en feu").
« Ce sont juste quelques mots que j'avais écrits sur un dessin, et qui peuvent faire surgir mille images chez chacun.»
David Lynch
David Lynch expose autre chose que du cinéma. Cela se passe actuellement, dans cette magnifique exposition qui a ouvert ses portes à la Fondation Cartier à Paris. En montrant ses dessins, ses peintures, ses sculptures et bricolages, installations et films d'animation, il va contribuer à relancer le débat sur la question du sens de son œuvre. Que doit-on comprendre ? Comment aborder ce monde si particulier ? |
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En effet le monde de Lynch est complexe. Les films que l'on connaît de lui ont montré sa capacité et sa volonté de s'écarter systématiquement du schéma narratif. Il n'a cessé de casser les codes de la narration. Le film ne doit pas être une histoire que l'on raconte en filmant des événements qui s'enchaînent et s'organisent de manière linéaire, mais le monde qui est dressé devant nous doit solliciter nos sensations, notre perception, stimuler notre imagination, inviter à une disponibilité qui va s'avérer féconde si nos sens sont en éveil. Il en est ainsi lorsque l'on regarde un tableau. |
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«Le cinéma n'est pas fait uniquement pour raconter des histoires, mettre en scène des mots et des dialogues, mais aussi pour créer une ambiance. Ce que je vois (...) c'est cette abstraction possible que le film partage avec la peinture. Aller plus loin dans l'abstraction, c'est aller vers une réalité plus profonde, qui existe en parallèle des autres. Si on vient de la peinture, on sait que l'histoire d'un film peut contenir une abstraction.»
David Lynch
Beaux Arts Magazine
entretien avec Emmanuelle Lequeux, mars 2007, p 100 |
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David Lynch répètera à l'envi qu' «il faut faire confiance à nos sens». Il ne s'agit pas d'aller envisager ses films comme des histoires policières qui seraient fondées sur une trame, et comporteraient une intrigue, une succession d'épisodes (nous menant parfois sur de fausses pistes) puis aboutissant à une chute avec identification d'un mobile et d'un coupable. Il faut accepter, d'emblée, de remettre en question les codes habituels et de considérer l'œuvre (appelons-ça un film, en l'occurence) totalement différemment.
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Le contact avec les œuvres de Lynch s'enrichira si l'on se laisse porter par différentes dimensions qui ne relèvent pas uniquement de la stricte signification que l'on peut donner aux choses et aux événements et on y gagnera en essayant de combiner cette logique (que l'on cherche légitimement à faire fonctionner et à appliquer) aux sens, à nos sens, à notre intuition, à notre capacité à produire des associations d'images ou de sons, à ce que l'on met en place dans les rêves, notre imaginaire ; à notre intelligence sensitive. Mais attention, sans qu'il s'agisse pour autant de verser dans un mysticisme ou une magie de pacotille. Lynch est quelqu'un d'intègre, quelqu'un qui a les qualités requises pour ne jamais tomber, ni entraîner les visiteurs de ses œuvres, dans ce travers. |
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Dans le magazine art press de février 2007 Stéphane Delorme, dans un excellent article, insiste sur la dimension de l' «affect» dans le cinéma de David Lynch : «La pierre angulaire est l'affect. D'abord l'affect désastreux qui précipite la chute et la hantise ; ensuite les affects multiples déchaînés par le jeu des hantises.»*
Stéphane Delorme développe l'idée que les films de Lynch, fondés sur l'affect, racontent finalement des histoires simples : |
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«Qu'est-ce qu'un film de Lynch ? Contrairement aux idées reçues, ses films avancent droit et sous la luxuriance visuelle, sonore, narrative, racontent des histoires simples. Lost Highway : un homme n'aime pas sa femme ; Mulholland Drive : une femme aime une femme ; à partir de ce postulat, le film cassé en deux sombre dans sa version panique et donne naissance aux démons.»* |
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Lynch va effectivement organiser «une ronde d'images autour de l'affect»*. Ses images ont été puisées à des sources variées : le monde de Francis Bacon y est identifiable. On y sent un attachement, une fascination, quelque chose de l'ordre d'un bouleversement. David Lynch sait jouer sur le renvoi à une sorte de mythologie personnelle peuplée d'anecdotes fondatrices ; que l'on se rappelle l'épisode de sa décision de créer une toile mouvante : il avait en effet l'intention de réaliser un tableau en mouvement. On raconte qu'un jour il vit dans son atelier une de ses toiles trembler fébrilement sous l'effet du vent. Il eut l'idée de réaliser une peinture mouvante et ce fut «Six Men Getting Sick» (1967) un petit film d'animation. Ce qui déclencha son désir de continuer à fabriquer des images qui bougent. Cette anecdote «fondatrice» de la démarche artistique, peut être perçue comme une commodité et fait indéniablement penser à ce que racontait Kandinsky de sa prise de conscience de l'abstraction sur la base d'un événement, également, personnel : «J'arrivais chez moi avec ma boîte de peinture après une étude, encore perdu dans mon rêve et absorbé par le travail que je venais de terminer lorsque je vis soudain un tableau d'une beauté indescriptible, imprégné d'une grande ardeur intérieure. Je restai d'abord interdit, puis je me dirigeai rapidement vers ce tableau mystérieux sur lequel je ne voyais que des formes et des couleurs et dont le sujet était incompréhensible. Je trouvai aussitôt le mot de l'énigme : c'était un de mes tableaux qui était appuyé au mur, sur le côté.»** Nous restons dans les affects. Vassily Kandinsky fait également partie du panthéon de David Lynch... A David Lynch, affectueusement. |
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fin |
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«The Air Is on Fire», exposition à La Fondation Cartier pour l'art contemporain du 3 mars au 27 mai 2007 |
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illustrations : 1. photographie de l'auteur 2. photographie de l'auteur 3. photographie : Patrick Griès, extrait du site de la Fondation Cartier 4. Le réalisateur américain David Lynch à Los Angeles, le 21 janvier 2007. AFP/ROBYN BECK textes : * art press magazine, février 2007, p 19 ** Vassily Kandinsky, Regards sur le passé, 1913-1918, trad. in Regards sur le passé et autres textes, 1912--1922, édition établie et présentée par Jean-Paul Bouillon, Paris, Hermann, 1974 |
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Commentaires |
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lundi 19 mars 2007
Rinpa ESHIDAN
Extrait : Dailymotion, envoyé par gabma |
Rinpa ESHIDAN
Extrait : Dailymotion, envoyé par gabma |
Commentaires
Sympa ces "taggeurs" hype-déco !
Très tapisserie tendance... mais bon.
Y a pas de mal à se faire du bien, hein ?!....
;-)
et quand on se fait bien du bien alors vive la vie
Commentaire n°3 posté par stéphane lecomte le 20/03/2007 à 13h20
Quand on se fait du mal, vive la mort ? un peu simplet. Se faire violence pour renaître, c'est pas mal non (...)Je disais juste que leur travail graphique -éphemère et plein d'entrain très chouette -me semble gâché pour tout ce que l'on voit dans les dernières déco du moment "à la mode". Et je trouve ça impersonnel au possible, voilà c'est tout
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dimanche 18 mars 2007
David LYNCH - The Air Is on Fire .4
The Air Is on Fire du 3 mars au 27 mai 2007 |
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«The Air Is on Fire» ("L'Air est en feu").
« Ce sont juste quelques mots que j'avais écrits sur un dessin, et qui peuvent faire surgir mille images chez chacun.»
David Lynch
Le feu est dans cette exposition qui débute ces jours-ci à la Fondation Cartier à Paris. Lynch aime ce feu qui nous brûle de l'intérieur. Cet air qui nous enflamme, cet air que nous respirons et que nous partageons avec nos semblables. Pour ce mystère.
Une énigme que David Lynch essaie de traquer par tous les moyens : cinéma, photographie, etc.
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Lynch s'approche, s'approche de la bouche rouge de la dame. Son regard est sélectif. Son œil fait la mise au point sur les lèvres. Rouges. Rouges comme le sont sûrement ses ongles. Là, David Lynch est photographe. La lumière, bizarrement distribuée va provoquer une image qui peut basculer sans que l'on n'y prenne garde vers une sorte d'abstraction. Certains nus exposés relèvent de cette quasi abstraction. La proximité intense du regard et la déformation par la lumière débouchent sur des formes chaotiques et l'on ne sait plus bien si l'on est devant un visage ou dans un paysage industriel abandonné, cabossé, suintant, à la manière de Tarkovski. De toute façon, tous deux jouent la séduction. |
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Le traitement de ces nus et visages de (belles) dames est à l'exact opposé de ce que Lynch met en œuvre lorsqu'il traite de peintures grand format avec personnages (voir billet sur la peinture). Dans ces photographies, la promiscuité amoureuse est là, tout entière. Le visage de l'artiste est à proximité de son modèle ; on doit pouvoir sentir le souffle, l'air chaud. Le champ du regard est rétréci, intense.
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En revanche, pour ce qui concerne ces grandes peintures (comme celle-ci, par exemple), l'espace que David Lynch installe semble être fait pour intégrer le visiteur/voyeur/regardeur extérieur que je suis. En effet, outre le format immense de certaines de ces toiles (qui m'intègrent de fait), les éléments du décor sont ouverts, déformés, disposés en éventail, et les personnages sont représentés en déséquilibre comme s'ils allaient tomber hors-champ de chaque côté du tableau (à la manière d'une photographie prise au grand angle, type objectif 28 mm). La relation à l'œuvre est radicalement différente.
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David Lynch est un photographe insatiable. Dans l'exposition nous voyons beaucoup de ces paysages incertains, brumeux, boueux, post-industriels. Noir et blanc. Certains sont animés de présences fragiles et éphémères comme ceux de la série "Snowmen", les bonshommes de neige. Blancs et noirs. L'unique serait amusant. La série, tous identiques et tous différents, donne un côté vaguement inquiétant.
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Et puis il y a, bien entendu, ces films d'animation et ces courts-métrages présentés dans le petit théâtre reconstitué par Lynch au centre du grand espace du sous-sol. Petit théâtre d'Eraserhead : colonnettes et rideaux épais, lampes à filaments au sol et damier (noir et blanc, toujours présents...). Des découvertes étonnantes. On ne peut tout évoquer. Les films se regardent et l'on a besoin de temps. Du temps qui se déroule avec parfois des boucles, des répétitions, des ressassements nécessaires à la transmission de affects. David Lynch nous promène dans un labyrinthe au sein duquel il nous est permis d'identifier certaines constantes ; à ce moment précis, l'étrangeté devient rassurante : nous sommes bien dans l'œuvre de David Lynch. |
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6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |||||
Les ombres sont très présentes. Un de ces fims expérimentaux mettant en scène les ombres c'est Intervalometer Experiments "Steps" (9, ci-dessus). Ce film est extraordinaire et d'une très grande beauté : un plan fixe montre un simple escalier de ciment. Les ombres avancent et mangent progressivement l'image. Très rapidement s'amorce cette dévoration entamée par l'angle droit, en bas ; elle gagne le centre puis la totalité à une vitesse vertigineuse. Au tout début, on ne repère pas qu'il s'agit d'ombres (accélération oblige). Ce sont des sortes d'animaux rampant, envahissant. Ne pas louper. Un autre de ces films mettant en scène l'ombre (du monstre, cette fois) c'est Out Yonder-Neighbor Boy (8) où l'on voit Lynch lui-même en présence de quelqu'un d'autre, assis sur un banc et une ombre à forme humaine gigantesque va progressivement s'avancer puis les recouvrir. Le son (comme d'habitude chez Lynch) est traité de manière singulière et troublante. Il y a également Alphabet (6) d'une grande beauté formelle, Boat (7), très mystérieux dans lequel la lumière excessive phagocyte le visage de Lynch ; l'ensemble finit par se perdre dans la nuit. Enfin The Grandmother(10), souvenir (?) recomposé inquiétant où la figure du petit garçon est malmenée. Tous ces travaux anciens s'inscrivent bien dans la logique de cet artiste qui a un monde véritable, un monde labyrinthique bien à lui, doué d'une grande cohérence malgré l'apparente confusion générale ou les prétendus égarements. |
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(peut-être) une suite, et fin les jours qui viennent. | |||||||||
«The Air Is on Fire», exposition à La Fondation Cartier pour l'art contemporain du 3 mars au 27 mai 2007 |
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illustrations : 1.Sans titre, sans date, photographie couleur, 27,9 x 35,3 cm ©David Lynch extrait du site de la Fondation Cartier 2. photographie de l'exposition. Distorted Nude, ©David Lynch, photographie : Patrick Gries (détail en vignette) extrait du site de la Fondation Cartier 3. Sans titre, sans date, photographie couleur, 27,9 x 35,3 cm ©David Lynch extrait du site de la Fondation Cartier 4. Do you want to know I really think ?, 2003, huile et technique mixte sur impression jet d'encre 152,4 x 296 cm, photo : Patrick Gries, ©David Lynch extrait du site de la Fondation Cartier 5. photographie "snowman" extraite d'une série de bonshommes de neige prises en 1993 à Boise. photograhie empruntée à un site consacré à David Lynch. 6. The Alphabet, 1968, 3 mn 45, 16 mm couleur ©David Lynch extrait du site de la Fondation Cartier 7. Boat, extrait des films expérimentaux 1998-2002, 7mn 15 video couleur, ©David Lynch extrait du site de la Fondation Cartier 8. Out Yonder- Neighbor Boy, extrait des films expérimentaux 1998-2002, 9mn 37 video couleur, ©David Lynch extrait du site de la Fondation Cartier 9. Intervalometer Experiments "Steps", extrait des films expérimentaux 1998-2002, 3mn 39 video couleur, ©David Lynch extrait du site de la Fondation Cartier 10. The Grandmother, 1970, 34mn 16 , 16 mn couleur, ©David Lynch extrait du site de la Fondation Cartier |
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mercredi 14 mars 2007
Robert DEVRIENDT
Les amants de la forêt |
Robert Devriendt, artiste néerlandais exposé à la galerie Loevenbruck. Devriendt raconte de petites histoires de la vie courante par séquences. Bonne peinture. Classique.
Ce qu'il faut que tu saches, lecteur, c'est que dans cette reproduction que tu as sous les yeux, on pourrait y loger deux fois la vraie toile : dimensions du tableau, 6,5 x 8,5 cm. |
L'effet est spectaculaire : tu rentres dans la galerie et sur les murs blancs de tout petits objets sont alignés au milieu de chaque pan de mur par quatre, cinq, parfois un peu plus. Le rapport de formats mur/œuvres est assez étonnant. |
Le mode d'accrochage, notamment dans le rapport que le format de l'œuvre peut entretenir au mur est passionnant. La parcimonie, la disparité, ou bien au contraire la profusion, la prolifération, interrogent le regard. J'avais évoqué cette question dans une série de billets précédents à propos des «cabinets d'amateur» et de certaines expositions actuelles qui proposaient des modes d'accrochage intéressants. Un autre artiste, Araki, actuellement exposé à la galerie Kamel Mennour, avait lui-aussi pris l'habitude de proposer des accrochages étonnants, allant dans le sens que j'indiquais ; l'exposition que nous avions vue, il y a quelques années au CNP, était tout à fait saisissante de ce point de vue. La seule pièce jouant sur l'accumulation qui est présentée chez Kamel Mennour est un caisson lumineux d'assez grande taille rassemblant des centaines de diapositives 24x36 non-découpées et alignées en de multiples registres (détail,agrandissement). Mais il ne s'agit malheureusement pas ici d'un parti-pris lié à l'espace. |
Exposition Robert Devriendt, «Les amants de la forêt», galerie Loevenbruck, 40 rue de Seine, Paris, 09 mars-28 avril 2007 Exposition Araki, «Carte blanche», galerie Kamel Mennour, 75 rue mazarine, Paris, 1 mars-14 avril 2007 |
illustrations :
1. Séquence (Passion & Crime), 2006 Détail d'une série de 5 peintures Huile sur toile ; 6,5 x 8,5 cm (carton de la galerie) 2. Séquence (Passion & Crime), 2006, série de 5 peintures Huile sur toile (extrait du site de la galerie) Commentaires
Humm ! C'est que huit petits rectangles vierges m'attendent... il faut que j'y aille ! A plus tard.
tres bonne expo à leovenbruck de Devriendt... vive le petit format...
Commentaire n°2 posté par stéphane lecomte le 14/03/2007 à 23h43
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Please visit http://teka.over-blog.org
Idem pour Nicolas.
Laurence : je n'étais pas en vacances !
Silent a (short) time for business. Je vois que, toi aussi, tu as fini par sortir la tête du trou !... ;-)))