Dürer : La mère de l'artiste. Dessin. 1514. Berlin Staatliche Museeun, Kupferstich-Kabinett. |
|
Lorsque Rubens dessina un portrait de son jeune fils, le grand peintre flamand était fier de la beauté de son enfant. Il désirait certainement nous le faire admirer. Mais cette tendance au joli et au plaisant risque de nous faire trébucher si elle nous conduit à écarter des oeuvres traitant d’un sujet moins séduisant. Le grand peintre allemand Albert Dürer a sans doute dessiné le portrait de sa mère avec autant d’amour et de dévotion que Rubens retraçant le visage de son fils. Cette étude pénétrante de la vieillesse sur le déclin peut nous heurter, mais si nous luttons contre cette répugnance instinctive, nous en serons grandement récompensés. |
|
Car, dans sa terrible sincérité, le dessin de Dürer est un chef-d’oeuvre. Nous comprendrons assez vite que la beauté d’un tableau ne coïncide pas avec l’agrément de son sujet. (…) La notion de beauté a ceci d’inquiétant que le goût et les canons du beau varient à l’infini. |
|
Histoire de l’art, Ernst Gombrich, Flammarion, édition de 1990, Introduction, p 4 Commentaires |
Ce portrait de la mère de Dürer, je le trouve extraordinaire car au delà des qualités artistiques, plastiques évidentes, il porte vraiment la contradiction soulevée par Gombrich sur l'éternelle question du Beau et de sa définition. Des choses apparemment "laides" (mais, faudrait définir ce que c'est...) sont habitées par cette idée du Beau (à définir aussi).
Boileau écrivait :
"Il n'est point de serpent ni de monstre odieux,
Qui, par l'art imité, ne puisse plaire aux yeux:
D'un pinceau délicat l'artifice agréable
Du plus affreux objet fait un objet aimable."
J'ai une admiration sans limites pour Dürer.
Je crois qu'il est de la même année que Saint Jérôme dans sa cellule et la Mélancolie (1514)..et à peu près contemporain du chevalier, la mort et le diable...cela fait curieux de rapprocher ces gravures.
Sur Melancolia, j'avais lu un petit livre de Roger Munnier..je ne m'en souviens pas bien , seulement que je l'avais aimé.
Lylian
Cette capacité de travail (liée à la qualité constante) est époustouflante.
Je ne connais pas ce livre de Roger Munnier. Le chapitre consacré la gravure de Dürer dans le catalogue de l'exposition Mélancolie est une mine. Passionnant.